À la recherche des (véritables) tomates ancestrales
Les vraies tomates ancestrales ne sont pas en vente dans les supermarchés, même si l’étiquetage indique le contraire.
La vaste majorité des tomates mises en marché comme « ancestrales » devraient plutôt l'être comme des tomates « de type ancestral ».
Photo : Getty Images / Mirceax
Avec leurs formes et leurs couleurs uniques, les tomates ancestrales ont la cote. Qu’elles soient plissées, allongées, dodues, rouges, jaunes ou pourpres, elles sont toujours réputées pour leur saveur et leur texture.
À Saint-Damase, en Montérégie, Judith Lussier cultive en serres des tomates qui rappellent en tous points celles d’antan.
Dans les supermarchés, les tomates de son entreprise – appelée « Tomaté! » – ne sont cependant pas toujours correctement présentées.
Et Mme Lussier insiste pour être transparente quant à la vraie nature de ses tomates.
On ne cultive pas des tomates ancestrales, mais des tomates "de type ancestral". On n’a pas de contrôle sur comment les gens la commercialisent.
Je pense que c'est un peu aussi la mission de Tomaté! d'éduquer les gens face à ça, ajoute-t-elle. Parce qu'il n'y a personne qui est mal intentionné dans la commercialisation par la suite.
Note
Ce texte a été modifié. Par souci de clarté, des informations ont été ajoutées sur les activités de l’entreprise Tomaté!
Judith Lussier inspecte des plants de tomates de type ancestral dans les serres de Tomaté!
Photo : Radio-Canada
La vraie tomate ancestrale
Comme tous les légumes du patrimoine, pour être considérée comme ancestrale, une variété de tomate doit être cultivée depuis plus de 50 ans.
Une autre caractéristique clef, c’est qu’elle doit être adaptée à un climat et à un lieu particuliers.
Les variétés patrimoniales sont également à pollinisation libre, c’est-à-dire que leurs fleurs sont fécondées par les insectes, les oiseaux ou le vent.
La tomate Mémé de Beauce est une vraie tomate ancestrale, dont les semences ont été retrouvées par hasard lors de la rénovation d’une maison.
Photo : Terre promise
Une tomate fragile
Si son entreprise ne produit pas de vraies tomates ancestrales, ce n’est pas faute d’avoir essayé, insiste Mme Lussier.
Après avoir testé le rendement des variétés ancestrales, le constat de Judith Lussier est sans appel : C’est un plant très inégal. Et la grosse tomate qu’il a pu faire, 90 % du temps elle n’était pas vendable.
Un mûrissement inégal, des tomates fendues, trop fragiles pour le transport et l’entreposage, sans oublier les rendements moindres, la liste des inconvénients est longue pour qui vise une production commerciale.
L'entreprise Tomaté! produit des tomates de type ancestral.
Photo : Radio-Canada
L’entreprise Tomaté! s’est donc tournée vers des variétés hybrides plus récentes, qui combinent à la fois les qualités prisées des tomates ancestrales et les caractéristiques requises pour assurer une mise en marché optimale.
On choisit nos variétés en fonction de la saveur, alors c'est vraiment la même saveur qu'on va aller rechercher
, souligne Judith Lussier.
Mais au final, ce ne sont pas de véritables tomates ancestrales. Parce que commercialiser cette tomate là, honnêtement, c'est pratiquement impossible
, résume Mme Lussier.
Où trouver les vraies tomates ancestrales?
Lyne Bellemare, fondatrice de Terre Promise, qui vend des semences, note que les tomates ancestrales sont difficiles à cultiver.
Photo : Radio-Canada
Les authentiques tomates ancestrales, elles ne durent pas aussi longtemps que les tomates conventionnelles
, note la semencière artisanale Lyne Bellemare, fondatrice de Terre Promise, une entreprise qui vend des semences du patrimoine.
Elles sont donc davantage adaptées aux courtes distances, et on les trouve difficilement sur les étals des commerçants. Ainsi, les tomates qui y sont présentées comme ancestrales ne le sont sans doute pas réellement, prévient-elle.
Le mot "type" a disparu et on vend les hybrides comme des ancestrales.
Au rayon des fruits et légumes, une affiche annonce des tomates ancestrales du Québec.
Photo : Radio-Canada / Hugo Pothier
L’idéal, c’est de s’informer à son marchand. Demander d’où viennent les tomates, d’où viennent les semences
, conseille Lyne Bellemare.
Il existe des tomates ancestrales vendues par les fermiers de famille sur les petits marchés au Québec, mais elles sont plutôt rares
, ajoute-t-elle.
L’autre option, c’est de les cultiver soi-même. Une manière de contribuer à sa souveraineté alimentaire et à la préservation du patrimoine végétal local.
Le reportage de Chantal Srivastava et Hugo Pothier sur les semences ancestrales, présenté à l'émission « La semaine verte ».
Photo : Radio-Canada / Allison Van Rassel