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Inégalités sociales : « Je trouve qu’on recule », déplore Françoise David

Françoise David, dans un parc, regarde au loin.

L'ex-députée de Québec solidaire Françoise David lors d'une conférence de presse sur la crise du logement. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers

L’ex-députée et cofondatrice de Québec solidaire Françoise David déplore que le filet social québécois se fragilise. « Honnêtement, on n'a jamais été totalement égalitaires, évidemment, mais on avait quand même progressé, et là, je trouve qu'on recule. Ça m'inquiète énormément », confie-t-elle en entrevue avec Radio-Canada en marge du Sommet des États généraux du travail social.

Je pense que le Québec de la Révolution tranquille rêvait plus et rêvait mieux.

Une citation de Françoise David, cofondatrice de Québec solidaire et ex-députée

Ça fait au moins 40 ans que les gouvernements qui se succèdent ont une vision très, très centrée sur la santé des gens et beaucoup moins sur les services sociaux, affirme-t-elle, ajoutant qu’il est tout à fait normal que la santé occupe une place importante, surtout dans une société vieillissante.

Et si on commençait par les services sociaux? Si on commençait par s'attaquer aux inégalités sociales? On aurait moins de gens dans les urgences des hôpitaux, poursuit-elle.

Le problème, c'est qu’un gouvernement gouverne pour quatre ans. Il veut des résultats immédiats.

Une citation de Françoise David, cofondatrice de Québec solidaire

Pour elle, il est absurde d’avoir l’impression que le gouvernement a rempli son contrat parce que la durée de l’attente moyenne dans les urgences a diminué.

Il y aurait moins de gens aux urgences s'il y avait plus de services à domicile, s'il y avait des cliniques ouvertes [24 heures sur 24, sept jours sur sept] partout, dans toutes les régions du Québec, si on s'attaquait aux problèmes du logement, puis que les gens étaient bien logés dans des logements suffisamment chauffés, si on augmentait le salaire minimum, les prestations, la sécurité du revenu, énumère la cofondatrice de Québec solidaire.

Bref, en misant sur les services sociaux en amont, il y aurait moins de gens malades, conclut-elle.

Ça fait très longtemps que les chercheurs en politiques sociales l'écrivent et le disent, mais les gouvernements qui se succèdent ne réfléchissent qu'à court terme, de façon électoraliste. Ça, c'est ce que je déplore le plus.

Des travailleurs sociaux qui quittent le navire

Cette opinion est partagée par le président de l’Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec, Pierre-Paul Malenfant, qui ajoute que les gens qui sont sur la première ligne du travail social sont aux prises avec une crise sociale sans précédent.

Le filet social au Québec est percé.

Une citation de Pierre-Paul Malenfant, président de l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec

C’est très confrontant de ne pas avoir les outils, de ne pas avoir un environnement et des politiques sociales qui font en sorte qu'on puisse aider convenablement les personnes dans le besoin.

Pierre-Paul Malenfant au centre-ville de Rouyn-Noranda.

Le président de l’Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec (OTSTCFQ), Pierre-Paul Malenfant (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Guillaume Renaud

La situation est telle que 19 % des membres de l’Ordre qui ont participé à un sondage ont confié qu’ils envisageaient de quitter le réseau de la santé et des services sociaux au cours des deux prochaines années parce que les conditions de pratique sont très difficiles, notamment à cause de la bureaucratisation de la profession, indique M. Malenfant.

Ce que je remarque depuis les 30 dernières années, c'est que les services sociaux au Québec ont dégringolé progressivement, ajoute M. Malenfant, qui se considère comme un vieux routier, tout en soulignant que la santé occupe de plus en plus de place.

C'est important qu'il y ait des soins de santé, que les gens aient accès à des services de santé : c'est correct. Mais quand vous avez des problèmes sociaux majeurs et qu'on voit que les décideurs mettent en veilleuse ou ont tendance à négliger la place des services sociaux, on ne peut que déplorer cette situation-là, ajoute M. Malenfant.

Il appuie son propos avec l'exemple de l’agence Santé Québec, créée tout récemment, en décembre 2023, et qui exclut les services sociaux dans son intitulé.

Je pense que c'est assez révélateur de la place que ça prend, affirme M. Malenfant en entrevue.

L'intervention sociale permet de changer les choses et on déplore que ce ne soit pas la priorité numéro un du gouvernement actuellement.

Une citation de Pierre-Paul Malenfant, président de l’Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec

Des conditions de pratique loin de leur ADN

Dans leur rapport sur la consultation publique, les commissaires des États généraux du travail social plaident pour une débureaucratisation de la profession.

Ce mode de gestion prend d’ailleurs plus de place dans le quotidien des intervenants, ce que déplore le président de l’Ordre, qui milite pour des conditions de pratique en phase avec l’ADN des acteurs du milieu : la relation d’aide.

Karine Joly sourit.

Karine Joly, du Regroupement des enseignantes et des enseignants des collèges en travail social du Québec (Photo d'archives)

Photo : Karine Joly

Les étudiants qui complètent une technique ou un baccalauréat en travail social sont bien outillés, estime Karine Joly, du Regroupement des enseignantes et des enseignants des collèges en travail social du Québec, mais ils se rendent vite compte que les conditions dans lesquelles ils exercent leur travail sont beaucoup plus difficiles dans la réalité.

Les États généraux ont donné une voix à une foule d’intervenants différents : utilisateurs, étudiantes, enseignantes, chercheuses, techniciennes en travail social, travailleuses sociales, entre autres.

Samedi, ils ont été 400 à échanger sur les recommandations formulées par les commissaires à la suite d’une année complète de consultations publiques chapeautées par l’Institut du Nouveau Monde.

Les participants ont préparé la déclaration commune publiée au terme de la journée avec l'objectif de créer plus de justice, d'équité et de solidarité tout en élargissant les alliances.

Les signataires de la déclaration s'engagent à :

  • unir leurs forces pour relever les défis sociaux;
  • promouvoir la reconnaissance des droits économiques et sociaux en exigeant des gouvernements les ressources nécessaires et des conditions d’exercice adéquates;
  • agir avec détermination en mettant en œuvre rapidement les recommandations des États généraux;
  • travailler en partenariat avec les communautés vulnérables.

Ce sommet avait deux buts bien précis, indique Pierre-Paul Malenfant : dire que la situation actuelle n’est pas acceptable et créer un mouvement de coalition pour faire entendre l’importance des services sociaux dans la société québécoise.

Des dizaines de personnes assises dans une grande salle prennent part à une assemblée.

Un rassemblement sur l’avenir du travail social au Québec a réuni les acteurs du milieu le samedi 20 avril à Montréal. Un peu plus de 400 personnes œuvrant dans le domaine du travail social ont assisté à des conférences, échangé et proposé des solutions pour l'avenir de ce secteur.

Photo : L’Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec.

Il n’est pas trop tard pour changer de direction

Le message de Françoise David aux acteurs du travail social réunis pour le Sommet au Collège de Maisonneuve se veut encourageant.

Vous n’êtes pas seuls […] et il n'est surtout pas trop tard pour se mettre ensemble, pour se mobiliser, créer des liens, des coalitions entre divers mouvements sociaux.

Une citation de Extrait du discours de Françoise David

Il y a du mouvement au Québec, ajoute la cofondatrice de Québec solidaire. On ne le voit pas tous les jours, on ne le sent pas du matin au soir, mais ça existe.

Il va falloir, à un moment donné, que toutes ces personnes-là, tous ces organismes-là, se mettent en rapport les uns avec les autres et se disent : "Qu'est-ce qu'on change? Par où on commence? Qu'est-ce qui est le plus urgent?"

Une citation de Françoise David, cofondatrice de Québec solidaire

Karine Joly sent effectivement un vent de mobilisation et un désir de faire front commun qu’elle a rarement vus de la part d’intervenants de milieux différents qui ont une vision commune de ce que devrait être le travail social.

C'est possible quand on est ensemble de faire plier, changer des gouvernements.

Une citation de Françoise David, cofondatrice de Québec solidaire

Le soutien de l’opinion publique aux travailleuses et travailleurs de la fonction publique lors des grèves, durant les négociations sur le renouvellement des conventions collectives, est porteur d’espoir, selon Mme David.

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