Intro
La chasse aux atomes
L'industrie
L'électronique
La médecine
La robotique
Conclusion

 

La médecine

Les nanotechnologies vont aussi remodeler complètement la façon dont on fait la médecine et la robotique. La médecine (dont la biologie, l'écologie et l'environnement) sera l'un des domaines les plus bouleversés par l'émergence de cette technologie.

 

 


Si vous réduisez un corps humain à ses ingrédients de base, vous obtenez trois petits récipients contenant de l'oxygène, de l'hydrogène et de l'azote. Des amas insignifiants de carbone, de calcium et de sel. Des pincées de soufre, de phosphore et de magnésium, et tout juste quelques grains d'une vingtaine d'autres éléments chimiques, comme le zinc ou le cuivre. Valeur sur le marché : 1,35 $.


Pourtant, la nature a transformé ces ingrédients abondants et peu chers en créatures qui grandissent et se reproduisent, qui pensent et qui courent de plus en plus vite! Ce qui fascine les chercheurs, ce sont les astuces mises au point par la nature pour parvenir à faire ce remarquable travail de nanoingénierie.

 

Normand Voyer est professeur au Département de chimie de l'Université Laval, à Québec. Dans son collimateur : les cellules cancéreuses... entre autres!


Les macrocycles : à l'attaque des cellules cancéreuses


Première étape pour l'équipe de Normand Voyer : concevoir sur tableau une molécule artificielle capable d'aller combattre les cellules cancéreuses sur leur propre terrain. Puis, vérifier si la recette de l'équipe est efficace. Résultat : les longues heures en laboratoire semblent montrer que la recherche est sur la bonne voie!

Normand Voyer fait alors dessiner la molécule sur ordinateur. Ensuite, il en fait un modèle en trois dimensions.

 

« Nous sommes partis du principe de base que la nature réalise des systèmes nanométriques extrêmement performants à l'aide de protéines. […] Nous nous sommes donc inspirés de ça pour créer nos nanostructures fonctionnelles, c'est-à-dire des protéines artificielles qui ont une structure de base inspirée des polypeptides, et qui organisent dans l'espace des espèces de grands macrocycles. » - Normand Voyer



Les macrocycles

Quand ils entrent en contact avec les cellules cancéreuses, les macrocycles, au nombre de six, s'alignent pour former un tube de quelques nanomètres de longueur.

Ces tubes, appelés nanopores, viennent s'incorporer dans la membrane des cellules cancéreuses pour y faire des canaux. « Il y a alors un échange d'ions sodium, présents en grand nombre dans le corps humain (le corps humain contient beaucoup de sel). Les ions entrent dans la cellule cancéreuse et la tuent. Bref, le débalancement physiologique entraîne la mort de la cellule », explique Normand Voyer.

 



L'idée, c'est d'utiliser cette propriété étonnante des nanopores pour fabriquer des biosenseurs, des espèces de chiens renifleurs moléculaires. Leur fonction : trouver la piste des pathogènes dans le sang, par exemple.



Plus important encore, ces nanopores peuvent être modifiés de manière à ce qu'ils puissent identifier, avec une précision chirurgicale, la signature électrique spécifique de différents pathogènes. Comme le streptocoque A, aussi connu sous le nom de bactérie mangeuse de chair. Pour le monde médical, c'est une percée remarquable.



« Dans les 10 à 15 prochaines années, on aura des dispositifs [conçus] à partir de nanostructures qui nous permettront de diagnostiquer, en temps réel, un pathogène, une bactérie ou un virus qui a infecté un patient »
, précise Normand Voyer. Finie l'attente de 24 à 48 heures avant de donner les antibiotiques appropriés, alors que c'est parfois une question de vie ou de mort.


Un petit tube qui redonne vie aux nerfs


Autre promesse de la nanomédecine : un petit tube en apparence très anodin. Pourtant, il redonnera vie à des nerfs sectionnés. Il a été mis au point par des chercheurs de l'Institut national de recherche scientifique, à Varennes. Fait d'un polymère biodégradable, mais qui laisse néanmoins circuler l'oxygène, l'intérieur du tube est tapissé de cristaux nanométriques. La fonction de ces cristaux est d'activer l'échange électrique, sans lequel la régénération des nerfs est impossible.


Maintenant, il faut tester ce petit tube sur des animaux de laboratoire. D'abord on coupe le nerf sciatique, un nerf important pour la marche. Ensuite, on installe le tube, on pousse le nerf à l'intérieur et on referme. C'est un succès. Le rat marche cinq jours après avoir été opéré!


Ou encore ces respirocytes, constructions nanométriques qui voyageraient dans le sang en distribuant l'oxygène aux endroits qui en manquent, tout en assimilant le CO2.

Mais l'intérêt des scientifiques ne s'arrête pas aux biosenseurs et aux nerfs qui repoussent. En nanomédecine, on voit voin. À l'horizon, des scénarios très futuristes. C'est le cas des nanocapsules contenant des médicaments qu'on injecterait par millions dans le corps humain.